Son fichu à fleurs détaché
Elle sue en battant le beurre
Les sabots et le front tachés
Marie abat son labeur
Le chat l’observe, assis
Il jette un œil distrait
Mais guette insoumis
Chaque goutte de lait
Au loin le bruit des vaches
Le père revient des champs
Dans la carriole sous la bâche
Le foin mouillé s’étend
Encore une soupe à cuire
Le cheval à panser
Le poêle à remplir
Les enfants à coucher
Plus un bruit dans la cour
Les animaux sont nourris
Enfin la tombée du jour
Quelques heures de répit
Le père est debout dans le noir
Sous la casquette les yeux bleus
Encore une bouffée ou deux
Marie veut qu’il fume dehors
C’est la place du fermier
Tout le jour depuis l’aurore
Quand apparaît le lapin dans le pré
Ils s’aimaient déjà avant guerre
Les enfants sont venus après
Quatre, Marie s’en souvient
Mais seuls trois sont couchés
De la fratrie il était le deuxième
Le philatéliste, l’intellectuel,
A la mort de l’héritier, la ferme
Le destin était sans appel
Marie dans une barque sourit
Robe fine et joli fichu
Son frère la photographie
Elle étend son pied nu
Ernest rentre dans la chaleur
Épuisé, le visage fermé
La soupe répand son odeur
Marie sert le dîner
Le temps, les enfants, les champs
Silencieux sous l’angélus
Ils ne s’écoutent plus vraiment
Bien sûr la passion s’use
Dans les yeux passent des nuages
Dans les mains, des pinceaux,
Des lectures, des voyages
Dans le froid vieillit le piano
A la mémoire de mon grand-père avec qui nous avions cent ans, et à ma grand-mère, peintre contrariée, aux obsèques de laquelle ce poème a été lu. Pour tout ce que vous m'avez appris à voir et à défendre.
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